... comme une orange ...

" "Merci de votre aide, Babs,me dit Mr. Archer avec un sourire en posant ses doigts collants sur son bureau. (...)"

Contrairement à Pierre Fromande, j'avais très bien entendu. Et contrairement aux membres du cabinet Truman, j'avais très bien compris ce qu'il voulait dire. Bien sûr, il était déjà arrivé que des professeurs m'attribuent des pseudonymes : Betsy, Barbara, "Vous dans le coin", "Rouge, non je plaisante". Entre douze et quatorze ans, je croyais d'ailleurs que mon nom était maudit, et que les enseignants murmuraient entre eux que "Bleue" avait des propriétés d'un stylo bille en haute altitude : si jamais ils le prononçaient, celui-ci laisserait des taches bleu foncé indélébiles.

Lottis Bergoney, intitutrice à Pocus, Indiana, avait même appelé papa pour lui suggérer de me rebaptiser.

"Tu ne vas pas en croire tes oreilles", avait-il prononcé en mettant la main sur le combiné tout en me faisant signe d'aller écouter sur l'autre poste.

"Je vais être franche avec vous, Mr. van Meer. Ce nom n'est pas sain. Les autres enfants se moquent d'elle. Ils l'appellent Marine. Quelques petits malins la traitent même de Cobalt. Et aussi de cordon bleu. Vous devriez peut-être songer à des alternatives.

- Auriez-vous des idées,Miss Bergie ?

- Bien sûr ! Je ne sais pas pour vous, mais moi, j'ai toujours adoré Daphné."

Peut-être était-ce le choix de Mr. Archer - Babs,le surnom d'une femme remuante qui ne portait pas de soutien-gorge pendant son cours de tenis ; ou peut-être était-ce la confiance avec lequelle il l'avait prononcé, sans trace d'incertitude ni d'hésitation.

Tout-à-coup, assise à ma place, je me sentis oppressée. Dans le même temps, j'avais envie de bondir de ma chaise pour hurler :

" C'est Bleue, espèce de connard !" "

Marisha Pessl, La physique des catastrophes , 2006.

" En français, bleu est devenu un mot magique, un mot qui séduit, qui apaise, qui fait rêver. Un mot qui fait vendre également. (...) La musique du mot est douce, agréable, liquide ; son champ sémantique évoque le ciel, la mer, le repos, l'amour, le voyage, les vacances, l'infini. Il en va de même dans plusieurs langues : bleu, blue, blu, blau sont des mots rassurants et poétiques, qui associent toujours la couleur, le souvenir, le désir et le rêve.

Cependant, contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce goût prononcé pour le bleu n'est pas l'expression de pulsions ou d'enjeux symboliques particulièrement forts. (...)

C'est l'une des caractéristiques essentielles du bleu dans la symbolique occidentale des couleurs : il ne fait pas de vague, il est calme, pacifique, lointain, presque neutre. Il fait rêver bien sûr (...) mais ce rêve mélancolique a quelque chose d'anesthésiant.

Le bleu n'agresse pas, ne transgresse rien ; il sécurise et rassemble."

Michel Pastoureau, Bleu, histoire d'une couleur, 2000.

Après la fièvre Jaune, nous voilà à bleuir (de froid ? de plaisir ?) . C'est toujours après une balade en Rose que ça arrive ...

Cette fois, madame A. est allée un peu plus loin qu'autour de son bureau , mais a , malgré tout, tourné autour de son nombril : des Bleus personnels jaillis de ses mains et quelques Bleus singuliers pour équilibrer.

Sophie Calle et son régime chromatique

Le costume d'un équilibriste du cirque de Pékin des années 30

Un masque de plâtre défraîchi (1994)

Un cheval bleu sur un mur framboise (2006)

Une perruque pour une Précieuse Ridicule (2004)

Des nuages pour un mobile (2009)

un morceau de décor (2006)

Une maquette du même décor (2006)

Une affiche du spectacle (2006)

Une variation autour de la Terre (2007)

Un autre bout du nain déjà vu en jaune

Tenté par le Bleu ?

Jette -toi à l'eau !